Maré, Iles Loyautés, Nouvelle-Calédonie : La plus sauvage
Mare est la plus australe, la plus massive et la plus élevée des trois iles loyautés puisque ses cinq étages de coraux superposés culminent à près de 130m sur la côte Sud, mais la seconde en superficie, puisqu‘elle mesure 650 km2. La plaine centrale constituée par l'ancien lagon est percée de nombreuses grottes et, sur la côte Ouest, entre Nécé et Enu, se succèdent de merveilleuses petites plages tapies entre les promontoires rocheux tandis qu'à Rawa et à Péorawa affleurent, dans le calcaire corallien, des roches basaltiques qui prouvent l'origine volcanique de l'ile.
Maré, Iles Loyautés, Nouvelle-Calédonie : Des Elétoke aux "guerres de religions"
A l'origine, Maré s'appelait Nengone et était peuplée par ies Elétoke (de Elé = téte, et rétok = prince), tribu mélanésienne qui semble avoir été détruite et absorbée par les Polynésiens immigrés au XVIIIe siècle. Le capitaine Butler, du Walpole, aperçut peut-être l'île en 1800 mais c'est le capitaine Raven qui lui donna, en 1803, le nom de son navire, le Britannia, qui ne lui est pas resté. Vers 1839, le grand chef Yeiw, fondateur de la dynastie actuelle des Naisseline, était le plus puissant de i'île mais ses premiers rapports avec les Européens ne se firent pas sans de nombreux et sanglants incidents.
En 1841, le révérend Murray introduisit le protestantisme à Maré et, les batailles continuant entre tribus évangélisées et celles qui ne l'étaient pas, le gouverneur Guillain vint rétablir la paix. Pour peu de temps, car le R.P. Beaulieu ayant fondé une mission catholique à la Roche, la présence des deux religions servit de prétexte à la reprise des hostilités. Les catholiques durent s'enfuir à l'Ile des Pins et les troubles durèrent jusqu'en 1883, époque à laquelle un poste militaire fut installé à Tadine. L'année suivante, de nouvelles bagarres éclataient. Le reverend Cru, pasteur français, fut dépêché pour remplacer le révérend Jones et supplanter |'influence anglaise, mais le "parti du bord de mer", dirigé par le grand chef Naisseline, qui s'était rangé aux côtés du pasteur Cru, s'opposa au "parti de l'intérieur" demeuré fidèle au révérend Jones.
En l89l, le pasteur Langereau fut envoyé pour calmer les esprits mais ne reussit qu‘imparfaitement dans cette tâche difficile et le pays ne retrouva son calme que quelques années plus tard.
Maré, Iles Loyautés, Nouvelle-Calédonie : Cultivateurs et chanteurs
La population se livre aux cultures vivrières et l'île produit également d'excellentes oranges mais surtout du coprah. A Nécé, résidence au grand chef Naisseline, il est possible d'assister à la fête des prémices de la récolte des ignames. C'est l'hommage rendu au chef en gage d'amitié et de fidélité. Cette fête marque le début de la recolte et le premier jour où l'on peut consommer les nouveaux tubercules. L'offrande commence à l'échelon familial et remonte la hiérarchie sociale, passant par le chef de famille et le chef de village pour aboutir au chef de clan. Les offrandes sont alors disposées dans un grenier spécial à l'intérieur de la chefferie. Autrefois, les femmes étaient exclues de cette cérémonie.
Les choeurs polyphoniques que l'ont peut également entendre à l'occasion des fêtes organisées dans l'ile, ou des réunions religieuses, justifient la réputation de bons chanteurs qui est faite aux Maréens.
Maré, Iles Loyautés, Nouvelle-Calédonie : Huit districts forment une seule commune.
Maré, dont la population s'élevaient en 1989 à 4 156 habitants, soit 3,l % de celle de la Nouvelle-Calédonie, constitue une commune dont le siège est Tadine. Elle conserve ses 8 districts, d'importance variable, placés chacun sous l'autorité d'un grand chef, alors que les tribus relèvent de la compétence d'un petit chef : le Guahma, le plus vaste, au nord, dont le chef-lieu est Nécé, puis les districts de Tadine, de La Roche, de Tawaïnèdre, de Pénélo, de Wabao, d'Eni et de Médu, qui portent chacun le nom de leur chef-lieu.
Maré, Iles Loyautés, Nouvelle-Calédonie : La Roche
Chef-lieu de district, le village doit son nom aux hauts rochers coralliens de 90 m d'altitude que les Maréens appellent Titi ou Tété, et qui servaient autrefois de forteresse et de refuge aux habitants lorsqu'ils étaient attaqués, en particulier durant les "guerres de religion" en 1869, 1880 et 1890. Au sommet, nous trouvons les restes d'anciennes fortifications d'où nous pouvons jouir d'une très belle vue en contre-bas sur le village et notamment son église. La mission, fondée en 1866, possède une église édifiée en1883 dont la facade est surmontée d’un clocher carré et massif. A l'intérieur, un vitrail célébre Saint Pierre Chanel, l'apôtre des iles Wallis et Futuna tandis qu'une esquisse d'ornementation d'un chapiteau peut-être observée à gauche du choeur. Derrière l'église, dans le cimetière, repose le R.P. Francois Beaulieu mort en 1926 et fondateur de la mission.
Maré, Iles Loyautés, Nouvelle-Calédonie : Le saut du guerrier
En sortant de La Roche par la route de Wakoné, nous rejoignons la côte Nord et sa splendide vue sur la baie de l'Allier fermée au loin par le cap Roussin, tandis qu'au pied de la falaise s'étale la belle plage de Kaewatine. Du temple de Wakoné, nous partons en direction de Hnadidi pour rejoindre à environ 1 km le Saut du guerrier, fissure de
5 m de largeur, creusée dans la falaise qui domine la mer de près de 30m. La légende veut qu'un guerrier, acculé par ses ennemis, ait franchi cette faille d'un seul bond. Nous ne tenterons pas l'essai l
Maré, Iles Loyautés, Nouvelle-Calédonie : Route de Tadine à Wabao
Nous séjournerons à deux reprises au sein de la tribu de Cengeite pour profiter de la superbe plage de Yejele et de son platier de corails très poissonneux. Bloqués par une tempête tropicale, nous aurons même à y dormir une nuit de plus lors de notre premier séjour. Pour s'y rendre, nous emprunterons la route de Tadine à Wabao, non seulement la plus belle route de l'île de Maré, mais également l'un des plus beaux parcours des îles loyautés, totalement différent de celui de Wé à Mou, à Lifou ou de Fayaoué à Saint-Joseph, à Ouvéa.
En quittant Tadine par le Sud, en longeant le bord de mer, nous atteindrons d'abord, à environ 1 km, une jolie piscine naturelle taillée dans le corail, où l'eau est d'une surprenante limpidité. Se vidant et se remplissant au rythme des marées par une grotte souterraine, le paysage n'est jamais le même. Un peu plus loi, aménagée sur un petit promontoire rocheux donnant sur la mer, nous trouverons la tombe du leader indépendantiste Yeiwéné Yeiwéné qui fut assassiné à Ouvéa, sur le tribu de Wadrilla, avec Jean-Marie Tjibaou en 1989. J'ai lu que, maintenant, il fallait demander l'autorisation à la maison d'en face pour s'y rendre et que prendre des photos étaient strictement interdits. Ce n'était pas le cas en 1991 ; je me suis tout de même abstenu d'en publier les photos.
Une fois passée la tribu de Nidénode, nous atteignons celle de Pédé, d'où une vue magnifique s'offre sur le cap Hnalé (ou cap Wabao). Le promontoire étant difficile d'accès, nous continuerons sur la petite route qui traverse les cocoteraies agrémentées de pins colonnaires élancés, espèce endémique au territoire (Araucaria Columnaris) dont la légende raconte que James Cook prit peur en découvrant la Nouvelle-Calédonie, à la vue éloignée de ces pins ressemblant à une armada de voiliers. De petits chemins mènent par endroit au rivage où criques et plages de sable blanc alternent avec des promontoires de coraux plantés de pins colonnaires en un admirable parcours. Le soleil est déjà bas sur l'horizon lorsque nous atteignons la tribu de Cengeité, groupée près de la plage de Yejele, autour de son temple. Nous y camperons plusieurs jours (est-ce toujours possible de nos jours?) lors d'un séjour, tandis que nous dormirons en tribu l'autre fois. L'endroit est un petit joyaux. Et continuez jusqu'à la tribu de Wabao ne gâche rien au plaisir des yeux, avec ses superbes cocoteraies et case mélanésienne traditionnelle.
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