Influence grandissante du Japon en Chine
En 1898, deux paquebots de la compagnie Osaka Shosen Kaisha (OSK), sous contrat avec le gouvernement impérial japonais, furent mis en service sur la rivière Yangtsze signalant la première menace à la domination chinoise et britannique sur la voie navigable la plus importante de la Chine. Moins de 40 ans plus tard, tous les navires britanniques ont été bannis de la rivière par les Japonais!
En 1907, la compagnie maritime japonaise Nisshin Kisen Kaisha (NKK), née de la fusion entre OSK et d'autres lignes maritimes japonaises, ouvre ses premiers bureaux à Shanghai, dans de vieux bâtiments anciennement utilisés par une société japonaise d'assurance-incendie et situés à l'angle du Bund et de la Guangdong Lu. Dix ans plus tard, le capital de la NKK a doublé, ce qui lui permettra d'acheter en 1918 un terrain sur le Bund sur lequel se dresserait leur nouveaux locaux, commandés au cabinet d'architecte Lester, Johnson & Morriss. Le bâtiment fut achevé à la fin de 1921.
La présence de NKK sur le Bund, aux côtés d'autres intérêts japonais, est révélateur de l'influence grandissante du Japon en Chine après la guerre sino-japonaise de 1894-1895. En 1921, la part du Japon dans le commerce extérieur de Shanghai a augmenté de 23% par rapport à 1900 pour faire à peu près jeu égal avec la Grande-Bretagne. Une anecdote intéressante citée par Marie-Claire Bergère, sinologue de réputation internationale, pour décrire l'investissement industriel en pleine croissance du Japon à Shanghai. "Le nombre de fuseaux japonais utilisés à Shanghai est passé de 112 000 en 1913 à 939 000 en 1925. Ils étaient maintenant cinq fois plus nombreux que les fuseaux britanniques et dépassaient les 677 000 fuseaux produits par les chinois».
Les années 1920, "golden years" pour le Bund
Les années 1920 connurent un boum de la construction sur le Bund où toutes les grandes puissances actives à Shanghai se devaient d'avoir pignon sur rue. Ceux qui avaient été visionnaires ou chanceux en achetant les terrains à la fin du XIX siècle firent des profits faramineux à la revente, tandis que déjà, se loger devenait problématique pour les couches sociales inférieures. Ainsi, FL Hawks Pott notait l'augmentation du coût de la vie à Shanghai dans "Une brève histoire de Shanghai», publiée en 1928 : "Les habitants de Shanghai ont commencé à sentir l'augmentation du coût de la vie, et les prix plus élevés de la nourriture causée par les conditions instables générales du monde. Le problème du logement est devenu très aigu, en particulier pour ceux qui vivent avec des salaires modérés. Ceci est dû à une inflation des loyers ... ".
Le bâtiment NKK construit en 1921, fut le premier né d'une grande série que connût cette décennie de prospérité. Si ce n'est peut-être pas le plus éblouissant des joyaux qui fleurirent, il n'en reste pas moins une réalisation sophistiquée, dans un style éclectique, typique des conceptions de Lester, Johnson & Morriss.
Le désormais légendaire restaurant M on the Bund
La compagnie NKK dut arrêter ses opérations quand la guerre de résistance contre l'agression japonaise (1937-1945) éclata. China Merchants Steam Navigation Co reprit le bâtiment en 1945, après la capitulation japonaise. Le bâtiment fut utilisé plus tard par le Bureau de gestion du port de Shanghai. Huaxia Bank ouvrit également une agence bancaire au rez de chaussée.
Mais c'est la restauratrice australienne Michelle Garnaut qui en visitant pour la première fois le bâtiment en 1998 eut l'idée de génie de réhabiliter le bâtiment pour en faire un lieu de référence à Shanghai.
«Il y avait de beaux parquets, des plafonds moulurés, toujours fantastiques», se souvient-elle lors de sa première visite à l'immeuble en Janvier 1998. "Nous avons dû monter les sept étages à pied car les ascenseurs ne fonctionnaient pas. J'ai ouvert une petite porte et il y avait la terrasse. Oh mon Dieu! En 1998, il y avait très peu d'endroits où l'on pouvait se tenir ainsi en terrasse et admirer une telle vue. C'était une position remarquable et une occasion immanquable pour faire quelque chose d'intéressant. " Malgré les mises en garde sur la fait que personne de sophistiqué n'irait au Bund et qu'il était impensable d'ouvrir un restaurant à plus de 5 minutes des grands hotels, Michelle Garnaut garda le cap et ouvra en 1999 son restaurant M on the Bund sur le toit. Ce fut un énorme succès.
M on the Bund ouvra ensuite la voie à nombre d'autres projets de restaurants et lieux culturels sur le Bund, mais reste LA référence. En Juin 2006, M on the Bund ouvrit le Bar Glamour dans le même bâtiment.
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